« V pour Vendetta » est à l’origine une BD d’Alan Moore. Graphiquement parlant, on peut difficilement faire plus glauque. Niveau scénario, on ne peut que péniblement faire plus grave. Tellement d’ailleurs que l’on n’a pas l’impression de lire une BD, mais un livre en tant que tel.
Dans une Angleterre post-tchatcherrienne devenue totalitaire (ce qui n’est pas sans rappeler « 1984 » de George Orwell), tout est soumis à contrôles par la classe dirigeante : les communications, les médias, la liberté d’agir, de penser et de se déplacer… et gare à qui n’obéit pas, ou c’est le goulag assuré ! En gros, tout va bien car le chancelier s’occupe de gérer les problèmes de ses administrés à coup de répression et d’arrestations massives. Tout est tellement sous surveillance que la moindre contestation, la moindre mutinerie ou le moindre putsch est inenvisageable. C’est là qu’intervint V, sorte d’anarchiste érudit portant un masque arborant un large sourire (et rappelant ceux de la Comedia dell’Arte), et qui, seul, ose défier le pouvoir pour provoquer un réveil des consciences.
Alors quand j’ai appris que cette BD allait être adaptée au cinéma, le doute m’a envahit. Et quand j’ai appris que c’était les Wachowski Bros ainsi que Joël Silver qui étaient à l’origine de l’adaptation, l’effroi m’a submergé. Les réalisateurs de la plus grande farce et arnaque cinématographique des années 90 (je parle bien entendu de « Matrix »), au commande d’une de mes BD favorites ?!? Après de longues nuits à sangloter, et à implorer les puissances célestes de nous éviter ça, il a fallu se rendre à l’évidence, ce film sortirait quoi qu’il arrive, ainsi en avaient décidé les déités hollywoodiennes…
Alors plus poussé par la curiosité que par l’envie, je suis allé voir la « bête ». Et là, stupéfaction. Plutôt que des pirouettes en bullet time et autres prouesses de cascadeurs, en lieu et place d’un Matrix 4, je me suis trouvé face à un film intelligent, plus bavard que spectaculaire, et surtout très fidèle au livre (avec des passages passés sous silence, comme dans toutes les adaptations). Même si le traitement reste très hollywoodien (diabolisation excessive du méchant, corrélation trop flagrante des costumes avec ceux du IIIème Reich, scène dite « d’action » totalement inutile et déplacée à la fin…), les scénaristes ont su garder l’ambiance très noire de la ville, et l’espèce de défaitisme qui plane au dessus de la population assujettie. Mais ils ont aussi bien retranscrit le caractère équivoque de V. Habillé comme au XVIIIè siècle, vivant dans un endroit rappellant étrangement un château (alors que nous sommes sous terre dans une ancienne station de métro), ce personnage tente de renverser le régime dictatorial en semant l’anarchie. Ce qui amène forcément à se poser des tas de questions : peut-on répondre à la violence par la violence ? Peut-on combattre l’injustice par des actes terroristes ? Bref, peut-on se targuer de lutter contre un régime totalitaire tout en utilisant les mêmes armes que lui ???
Vous imaginez bien que je n’essayerai même pas ni de porter réponse à ces questions, ni d’ouvrir un débat, c’est à vous de vous faire votre propre opinion en allant voir (ou en lisant) cette oeuvre.
mardi, mai 23, 2006
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